Compositions
Les
illustrations sonores sont disponibles en standard
MP3.
- Dripsody:
An Etude for Variable Speed Recorder (mono version) (1955)
1:28
- Ninety-Nine
Generators
(1956) 1:41
- Invocation
(1957) 2:20
- Study No.
1 for Player Piano and Tape (1957) 1:17
- The Burning
Desk (without words) (1958) 4:16
- A Noisome
Pestilence
(1958) 2:05
- Textures
(1959) 1:23
- Nocturne
(1962) 3:09
- Bird Spectrogram
(1963-64) 0:59
- Music for
Expo
(1967) 2:15
- Safari:
Eine Kleine Klangfarbenmelodie (ca. 1968) 3:08
- Mobile:
The Computer Laughed (Perpetual Motion) (1970) 1:51
- Paulution
(Charnel Number Five) (1971-72) 4:09
HUMOROUS
SKETCHES
- This Thing
Called Key
(1956) 1:54
- Arcane
Presents Lulu
(1956) 1:50
- The Burning
Deck, original version with words (1958) 4:35
- Sounds
To Forget (excerpt)
(1963) 2:39
Démonstrations
- La
saqueboute
- L'orgue
à touches sensibles
(Les chiffres
entre crochets indiquent la plage du disque compact.)
[11] Pour réaliser
Dripsody:
An Etude for Variable Speed Recorder
(Dripsody: Étude pour magnétophone à vitesse
variable), composée en une nuit, Le Caine a utilisé
un enregistrement d'une goutte d'eau tombant dans un seau, qu'il
a ré-enregistrée à des vitesses différentes,
obtenant les hauteurs d'une gamme pentatonique. Au moyen de 25
raccords et du magnétophone à vitesse variable,
il a produit des milliers d'événements sonores.
Dripsody commence par le son original de la goutte d'eau, répété
en boucle. Peu après, par l'ajout d'autres boucles, la
densité du son augmente et une figure en arpège
est produite. L'œuvre complète, d'une durée d'une
minute et vingt-six secondes, fut achevée à 7h30
du matin, et Le Caine la joua à ceux qui arrivèrent
tôt au laboratoire.
[12] Le titre
de cette composition Ninety-Nine Generators
(Quatre-vingt-dix-neuf générateurs) renvoie aux
99 générateurs de son de l'orgue à touches
sensibles -- un générateur distinct pour chaque
note du clavier qui peuvent tous être actionnés simultanément.
Le Caine utilise ici une pédale de résonance et
un dispositif pouvant modifier la hauteur de façon à
produire un vibrato ou de longs glissandi impossibles à
réaliser sur un orgue. La réverbération particulière
de cette pièce est causée par l'acoustique inhabituelle
de l'endroit où elle a été enregistrée.
[13]
This
Thing Called Key
(Cette chose appelée tonalité), assez simple pour être
exécutée en direct, démontre les effets de
changement de vitesse de défilement de la bande sur ce
que Le Caine appelle «une pauvre petite pièce sans
défense», enregistrée en boucle et répétée
un grand nombre de fois alors que la vitesse de lecture de la
bande est variée. L'œuvre débute dans la tonalité
originale, puis s'aventure dans des tons de plus en plus éloignés.
[14]
Arcane
Presents Lulu
(Arcane présente Lulu) est accompagnée de la note
explicative suivante, attribuée à Arcane Productions
-- vraisemblablement une étiquette pour les œuvres moins
sérieuses de Le Caine : «En décembre
1956, nous avons entendu dire que des aboiements de chiens avaient
été utilisés pour une version définitive
de "Jingle Bells". Sans avoir entendu l'enregistrement,
nous avons cru qu'une action prompte de la part d'Arcane était
nécessaire afin qu'elle maintienne sa position de chef
de file dans ce domaine et donc, qu'un son encore plus irritant
devait être mis au service de la musique. C'est exactement ce que nous
avons fait et nous sommes fiers de présenter, pour la première
fois, la coloratura hurlante».
Arcane Presents
Lulu
est un collage de notes, d'accords et de fragments de mesures
tirés d'autres œuvres musicales, dont la Symphonie romantique
de Hansen et España de Chabrier. La mélodie est
construite à partir du cri avec lequel se termine la partie
de Lulu dans l'opéra d'Alban Berg, et qu'on entend également
à la fin de This
Thing Called Key. Toutefois, il est ici traité
de manière à former une mélodie.
[15] Avec les
améliorations apportées au magnétophone multipiste,
Le Caine décida de réaliser une version stéréo
de Dripsody: An Etude for Variable Speed
Recorder.
Dans cette version, Le Caine a fait davantage appel au traitement
sonore et a développé une texture plus complexe.
«Juste avant les arpèges, j'ai introduit des sons
de goutte fabriqués à partir de la goutte originale,
mais caractérisés par des glissements de hauteur
semblables à ceux que j'avais observés dans les
gouttes d'eau qui ne furent pas utilisées dans l'enregistrement
de 1955. Pour les préparer, j'ai fait jouer le son de la
goutte très lentement tout en faisant varier rapidement
la vitesse. J'ai alors retransposé les enregistrements
obtenus dans le registre que je désirais.»
[16]
Invocation s'ouvre par un trio de
trois sons enregistrés et joués à la vitesse
originale d'enregistrement : celui d'une vitre brisée
avec un marteau, celui d'une balle de ping-pong frappant une raquette
et la goutte d'eau de Dripsody. Ces sons constituent les
«instruments» utilisés dans la pièce.
Les «égouttements» sont configurés en
rapides glissandi ascendants et descendants; une série
d'accords est construite à partir d'un «roulement»
soutenu de timbres de verre; le déplacement du son de la
balle de ping-pong -- de gauche à droite -- s'accélère
progressivement; des grondements graves et des articulations aiguës
apparaissent alors que les changements soudains de canaux se multiplient.
L'introduction de ces gestes perturbe la progression ordonnée
des boucles, et l'inclusion de petites bandes de papier raccordées
au ruban et qui produisent des sons rugueux et saccadés
accentue davantage cet effet de rupture. Vers la fin de la pièce,
des sons soutenus se sédimentent en un accord résonant,
mais dès que cet effet est installé, la bande ralentit
et s'arrête, comme si quelqu'un avait débranché
le magnétophone. On entend ensuite un son particulièrement
violent de verre qui se brise.
[17] Le magnétophone
et le piano sont tous deux des appareils de reproduction musicale
que Le Caine compare dans Study
No. 1 for Player Piano and Tape
(Étude no. 1 pour piano mécanique et bande magnétique)
du point de vue de leur traitement de la hauteur, du volume et
du timbre. Le Caine a conçu une série de permutations
de six motifs coupés dans le rouleau d'un piano mécanique
à l'aide d'un scalpel. Les motifs, dont les hauteurs sont
déterminées par une série de douze sons,
sont joués dans le sens original et à rebours sur
le piano mécanique et le magnétophone et sont transformés
au moyen de changements de la vitesse de défilement de
la bande.
[18] Dans
The
Burning Deck
(Le pont en flammes) Le Caine a mis en musique le poème
Casabianca de Dorothea Felicia Hemens, lu par lui-même.
«La tentation de réunir les clichés de la
poésie victorienne et ceux de la musique électronique
s'est avérée irrésistible», écrivait
Le Caine. Dans cette œuvre, Le Caine emploie pour la première
fois la réverbération. Tous les sons ont été
enregistrés à partir du piano mécanique et
modifiés à l'aide du magnétophone à
application spéciale.
Dans cette pièce,
l'organisation des hauteurs est simple et évoque souvent
directement la gamme de do majeur. Toutefois, le matériau
s'obscurcit après l'ouverture, de même que la régularité
du piano mécanique. En comparaison avec la simplicité
des matériaux de départ, la complexité des
textures développées par Le Caine témoigne
de son imagination et de sa maîtrise technique du son. Lorsque
Le Caine composait au laboratoire, une sorte de chaos régnait
autour de lui. En plus de l'équipement technique et des
piles de papiers et de livres, il y avait des piles de bandes
magnétiques. Les sons utilisés dans
The Burning Deck
ont été assemblés sur une trentaine de bobines,
numérotées et décrites dans la partition,
avec des détails concernant les niveaux de volume, le degré
de réverbération, et le rythme du texte. La plupart
d'entre elles étaient conçues pour être utilisées
en boucle. Bien que l'on ne faisait défiler simultanément
que six bandes, certaines étaient longues de plus de trente
pieds. Les bandes sortant du multipiste allaient s'enrouler autour
de différents objets du laboratoire, le traversant de long
en large. Lorsque toutes les bandes étaient jouées
en même temps, on entendait dans le laboratoire un bruissement
doux qui se superposait au son provenant des haut-parleurs.
[19] Dans
A
Noisome Pestilence
(Peste bruyante) -- une pièce dépourvue de métrique
régulière, mais dont l'articulation rythmique est
très élaborée --, Le Caine est allé
plus loin dans son exploration des sons créés à
partir de bruits à bande étroite, qu'il avait d'abord
élaborés pour The Burning Deck, et qui forment ici
son matériau principal à partir duquel il a construit
des boucles contenant de courts motifs rythmiques. Ces boucles
sont agencées au moyen du magnétophone à
application spéciale de façon à former des
figures qui s'interpénètrent et se dissolvent. Le
volume des bandes est contrôlé par les touches sensibles
du magnétophone à application spéciale, tandis
que les sons proprement dits sont transformés au moyen
de changements de vitesse de défilement. Les boucle reproduisent
chacune un motif rythmique distinct. Elles sont introduites dans
la pièce l'une après l'autre. Par son utilisation
des bandes de bruit, la composition explore la transition graduelle
entre le bruit sans hauteur identifiable, et les sons qui sont
perçus comme dotés d'une hauteur. À mesure
que la vitesse de lecture augmente, on perçoit de plus
en plus aisément la hauteur des sons. Cette composition
présente également un niveau surprenant de variation
de timbre. Lorsque les sons sont joués à différentes
vitesses, leurs caractéristiques changent parfois de manière
tout à fait radicale.
[20] Le matériau
brut de Textures consiste en des sons de
trombone enregistrés par John Bowsher. Si dans des œuvres
antérieures Le Caine avait déjà exploré
certains aspects de la composition sérielle, Textures a été sa première tentative d'écrire
de la musique dodécaphonique contrapuntique. Il emploie
ici la série du Concerto pour violon de Berg de 1935.
Les traitements
sonores sont considérablement moins spectaculaires que
dans d'autres compositions. Le trombone demeure reconnaissable
durant toute la pièce, de même que les hauteurs des
sons. En dépit de sa brièveté, cette œuvre
atteste sans contredit de la maîtrise compositionnelle de
Le Caine.
[21]
Nocturne a été réalisée
sur un clavier conductible utilisant des touches à circuit
imprimé. Tous les générateurs de son sont
actionnés par la conductibilité électrique,
proportionnelle à la pression exercée, des doigts
de l'interprète. Un toucher legato produit des sons soutenus
avec des attaques et des extinctions graduelles alors qu'un toucher
staccato produit des sons articulés. Un système
de bandes produisant un effet d'écho reprend par intermittence
des sons déjà enregistrés.
[22]
Bird
Spectrogram
est un extrait d'une bande que Le Caine utilisait pour ses conférences
sur le spectrogramme, un instrument utilisant des cellules photoélectriques
pour lire l'information tracée sur un rouleau de papier
millimétrique afin de contrôler un module d'oscillateurs
et de permettre la technique de synthèse additive.
En octobre 1959,
Le Caine avait déjà reproduit par synthèse,
à l'aide du nouvel appareil, plusieurs chants d'oiseaux
qu'il fit entendre lors d'une conférence de l'Audio Engineering
Society. Il souhaitait étudier attentivement les chants
d'oiseaux du fait de leur similitude avec les sons électroniques :
«les oiseaux, avec leur organe mobile très léger
et leur important rapport force-inertie, peuvent produire une
modulation de fréquence rapide, une modulation d'amplitude
rapide et un changement de hauteur rapide».
[23]
Music
for Expo
était la bande sonore d'un film sur le générateur
de structure sonore sérielle qui était présenté
à l'Exposition universelle de Montréal en 1967.
Bien que cet instrument ait été conçu à
l'origine pour faciliter la sérialisation de tous les paramètres
sonores, il est utilisé ici pour générer
des motifs plus simples dont les timbres et les hauteurs sont
développés, contractés et modifiés
au cours de la pièce.
[24]
Safari:
Eine Kleine Klangfarbenmelodie
a été réalisée à l'aide de
la sonde, un instrument pouvant générer 200 ondes
sinusoïdales séparées par intervalles de cinq
hertzs. La fluctuation des timbres témoigne d'une approche
plus complexe de la synthèse additive que ce n'était
le cas dans Bird Spectrogram. Le sous-titre témoigne de
la conscience qu'avait Le Caine des conséquences à
la fois timbrales et mélodiques des transformations du
«nuage» d'ondes sinusoïdales.
[25] La forme
de Mobile:
The Computer Laughed (Perpetual Motion)
s'inspire probablement des mobiles d'Alexander Calder. Le Caine
a écrit : «Plusieurs motifs et ornements ont
été introduits directement dans le "Data Systems
Computer" du CNRC. Le son obtenu a été assemblé
sur bande de diverses façons. De temps à autre,
les éléments forment une alliance temporaire qui
semble vouée à produire une harmonie et un contrepoint
reconnaissables; toutefois, avant que cela n'arrive, ils se séparent
de nouveau et se rassemblent différemment.»
[26]
Paulution
(Charnel Number Five)
est caractérisée par un emploi généreux
du vibrato et de la variation de hauteur. Le clavier à
touches sensibles de trois octaves du synthétiseur polyphonique
comprenait des oscillateurs réglables et des contrôles
de forme d'onde indépendants pour chaque touche. Plusieurs
hauteurs et timbres sont superposés, et il y a souvent
ambiguïté quant aux sons relevant du timbre et ceux
relevant de la hauteur.
Démonstrations
La
saqueboute
La saqueboute de 1948 a été conçue et construite
entre 1945 et 1948. Cet enregistrement, qui comprend des commentaires
de Le Caine, a été réalisé en 1953.
Le Caine donne ici des exemples sonores de formes d'ondes bien
connues (carrée, impulsion, en dent de scie) en jouant
des mélodies accompagnées par un ensemble (un piano
et un des premiers prototypes de l'orgue à touches sensibles),
qu'il a mixé au moyen d'une des premières versions
de son magnétophone multipiste. La saqueboute est maintenant
considérée comme le précurseur des synthétiseurs
analogiques des années 1970 -- le «premier»
synthétiseur analogique.
[1] Dans la
première partie de cette démonstration, la saqueboute
tient la partie de clarinette de Rhapsody in Blue de George
Gershwin. Le compositeur a seulement utilisé une onde
carrée dont l'articulation est produite par des changements
de hauteur et de volume au moyen du clavier à touches
sensibles. 0:58
[2] La section
suivante donne un exemple du contrôle de formant variable
-- l'effet «doo-wah» -- où le son caractéristique
de la forme d'onde est transformé par l'ajout de fréquences
aiguës sans affecter la hauteur apparente de la note. Ici,
la saqueboute évoque la trompette de Clyde McCoy telle
qu'on peut l'entendre dans Sugar Blues. 1:02
[3] ILe Caine
tente ensuite de reproduire le son d'instruments à cordes :
il a arrangé la Danse des esprits bienheureux pour quatuor
à cordes tirée d'Orphée et Eurydice de
Gluck. 2:10
[4] Dans la
dernière section, on entend une composition de Le Caine
dans laquelle il fait la démonstration de certaines propriétés
uniques de la saqueboute sans imiter d'autres instruments. 1:20
L'orgue
à touches sensibles
Cette démonstration est une introduction aux différentes
techniques rendues possibles par le clavier à touches sensibles.
En variant la pression des doigts, Le Caine pouvait contrôler
le volume et l'attaque d'une note. Il pouvait ainsi faire ressortir
une ligne mélodique, accentuer une structure rythmique
et conférer une indépendance aux différentes
voix d'une œuvre contrapuntique.
[5] Des changements
d'intensité permettent de jouer des mélodies et
des accompagnements distincts sur le même clavier. 1:02
[6] L'accentuation
de notes spécifiques augmente l'effet des syncopes dans
la musique. 0:49
[7] Dans la
musique contrapuntique, la sensibilité du clavier favorise
l'indépendance des voix distinctes. 0:57
[8] Lorsqu'une
même note apparaît dans deux voix distinctes, elle
peut être entendue comme si deux claviers étaient
utilisés. 0:53
[9] Les techniques
pianistiques d'attaques graduelles et percussives sont très
efficaces sur le clavier à touches sensibles. 1:29
[10] L'intensité et l'attaque peuvent varier d'une note
à l'autre. 2:39
|